De la réincarnation

Publié le par Lène



« [...] Ella est mon salut. Elle aimera l'autre voie, et même, si elle le souhaite, elle pourra créer la sienne ; je lui prêterai des pierres, du bois, tout ce qu'elle voudra, mais pas de béton. Toutes les voies nouvelles sont en béton, et c'est moche. Toutes les Emilie, Elodie et Lucie du monde marchent sur du béton. Ella elle, elle marchera sur du sable, sur des bonbons, sur des gamelles, des nounours, des poubelles ou des rats, sur tout ce qu'elle voudra tant que c'est différent. »
*

Bouffer du noir, un peu trop peut-être ; en faire une overdose et se sentir mille fois désolée. Ou pas. Il n’a tellement pas besoin de moi. Sentir qu’on n’a foutrement rien à perdre, et pas le temps de se torturer l’âme pour savoir ce qu’on devrait faire, comment on devrait le faire, de ce que les gens penseront, de ce qu’il en découlera. On s’en fout. Rien à perdre, et rien à gagner sur ce sujet précis j’pense ouais, mais rien à perdre.
Quelque chose de paniquant et de foutrement attirant là-dedans, puisque quoiqu’il en soit, l’erreur n’existe plus. Les repères non plus. M’enfin les bornes en soi, ça n’a jamais été mon truc, même si c’est comme tout, on a beau s’y opposer fermement, s’en écœurer à en gerber, on les suit. On les suit à mort. C’est comme tous ces clichés que j’ai eu l’occasion de relever cet été : des stéréotypes, des lieux communs auxquels on n’adhère pas en théorie, et qui, malgré tout, restent nichés en nous, par habitude collective, par matraquage inconscient, un espèce de schéma installé dans chacun d'entre nous à la naissance ; une puce totalement et fatalement intégrée, mais tout au fond, et sous des kilos de draps colorés qui font que ouais, on se dit naïvement qu’on est d’une tolérance, d’une droiture et d’une intégrité inébranlables. Y a certaines choses qui nous échappent et nous emprisonnent plus que tout le reste ; c’est la loi de la société. On dit que profitant de ses avantages, on doit s’accoutumer à ses inconvénients.  J’espère malgré tout qu’il n’y a pas que moi que ça dérange. Je sais que je n’y peux rien, mais ça ne me convient foutrement pas. Je les sens revenir, après avoir tout fait pour les briser, je sens ma volonté s’effacer comme sous un inébranlable refoulement sécuritaire. Les CRS de l’âme putain, non mais franchement, j’sais pas quoi en foutre…. Quelle… merde.

Quitte à en ressentir le malaise, j’veux rester dans cette clairvoyance, savoir que non je n’ai rien à perdre, et non je n’ai rien à surprotéger comme je le fais. J’en ai qu’une de vie bordel, alors oui, ça fout le vertige ; un vertige horizontal, un vide, parce qu’on ne tombe pas non, simplement on marche droit devant direction le néant sans aucun sol pour nous soutenir, nous donner la forme, la couleur, rien. Je préfère le néant à un chemin tracé, dessiné, coloré, mesuré, pesé, nommé, réglementé. J’me sens bien dans ce genre de mal être, tout simplement parce que j’me sens enfin moi. J’ai tendance à la désincarnation, et je déteste ça, au point de me dire qu’il faut que je me répète tout ça chaque jour pour ne pas, ne surtout pas retomber dans cette espèce de torpeur, de construction de scénario de ma vie, de ce que je devrais faire, de comment je devrais le faire, et de ce qu’il en découlera. Passer de la personne au personnage, du personnage au metteur en scène, et du metteur en scène à l’auteur, ça, ça m’est insupportable. Oui, j’ai inexplicablement connu des problèmes de focalisation.


*Extrait du roman-pas-encore-écrit.. Mouarfmouarf
** le monochrome, ça m'rend brune... mouarfmouarf bis

Publié dans De la vie

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A
C'est le fait de tout analyser de ton quotidien qui engendre ce "malaise" ! Outre la fatigue qui en résulte, si tu as tendance, d'après ce que je peux lire à "voir le verre à moitié vide", il ne faut qu'un pas pour en arriver à tout voir en noir.<br /> T'as tellement peur de ressembler aux autres et de perdre ton unicité que tu cherches par tous les moyens à t'en démarquer.<br /> Mais ne penses-tu pas que dans chaque stéréotype il y a toutefois quelque chose à en tirer ? Une valeur masquée derrière l'image visuelle?<br /> Ta plus grande crainte serait qu'un jour, tu t'arrêtes de marcher et qu'en te retournant tu sois déçue de ton voyage. Les "bornes", personne ne te les impose, excepté toi !^^<br /> La vie n'est pas une ligne droite selon moi, mais une courbe que l'on peut modeler, et retravailler si le résultat n'est pas probant. <br /> Le destin est le tronc de l'arbre, ton libre arbitre choisira la direction que prendront ses branches.<br /> Prend la vie comme elle vient, et retire sa muselière.
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S
Perso moi je fais plus simple: je me pose aucune question. L'orientation s'est d'ailleurs résumée à ça... tu veux faire ça: ok... et c'est parti. Au final je regrette pas trop mais je me pose pas non plus la question de savoir si je regrette ou pas. D'un autre coté je ne suis que le spectateur de ma vie, mais après tout la place est pas si inconfortable, et la vue y est meilleure, plus panoramique, que si j'etais sur la scene.
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M
Je ne sais pas quand, et ça m'éneeeeeeerve... Quant à Elle elle est toujours aussi belle !
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